Hypnose et science

Les hypnotiques, dont l’hypnose, permettent de modifier l’état de conscience (par différents moyens) pour travailler à un mieux-être (par différentes méthodes).

Pour commencer, faisons connaissance avec les hypnotiques et les moyens qu’ils proposent pour parvenir à différents EMC (état modifié de conscience) dans lesquels des processus de travail transforment la subjectivité.

Penchons-nous ensuite sur quelques points éclaircis par les neurosciences sur l’EMC de l’hypnose.

Voyons enfin comment les scientifiques tentent de définir le taux d’efficacité de l’hypnose

La lettre des neurosciences, p11 du numéro spécial hypnose: Résultats du questionnaire à 11 items, développés dans notre institution pour évaluer le vécu des patients opérés d’un gliome cérébral sous hypnosédation. https://snhypnose.fr/wp-content/uploads/2015/09/publication.pdf

Les hypnotiques

On peut qualifier d’ « hypnotiques » les nombreuses méthodes qui, comme l’hypnose, permettent de transformer la subjectivité de l’individu (comment je me sens, mon état mental et émotionnel, ce dont je me sens capable, mes représentations… et ce qui en découle: comportements, choix, réalisations) par un état de conscience modifié.

Les hypnotiques rassemblent donc :

Une méthode pour modifier volontairement l’état de conscience (méthode et EMC sont différents selon les hypnotiques)

Un processus de travail sur soi à dérouler pendant l’EMC (pour se sentir mieux, se libérer de blocages ou de liens toxiques, se tranquilliser, créer de nouvelles voies…).

Certains hypnotiques utilisent des drogues hallucinogènes

(LSD, champignons, ayahuasca, peyotl, ibodega…), ce qui est interdit en France.

L’une des conséquences est que le tourisme chamanique en Amazonie est devenu une  véritable industrie.

Préparation de l’Ayahuasca

D’autres hypnotiques ont développé des moyens différents pour permettre au cerveau de fabriquer ses propres drogues de modification de la conscience.

La respiration holotropique vient d’ailleurs des recherches du psychiatre-psychanalyste américain Stanislav Grof et de son épouse Christina, qui se sont vus interdire le LSD en tant que méthode pour atteindre l’EMC qui permettait d’appliquer une méthode « pour une vision unifiée des différents plans de l’être » (physique, psychologique, mental, affectif …).

Ils ont alors développé une respiration qui « remplace » le LSD (conjuguée à des sons et à un travail corporel).

Le principe fondamental de la thérapie transpersonnelle par la respiration holotropique est d’ailleurs la reconnaissance du potentiel curatif des états non ordinaires de conscience, dans lesquels la psyché manifeste une activité auto-thérapeutique spontanée.

Voyons quelques procédés pour obtenir un EMC sans drogue (la liste n’est pas exhaustive):

Battement binaural au casque:

pulsation produite par notre cerveau, lorsque ce dernier reçoit deux signaux sonores de fréquence différente. Ex: un son “plat” à 114Hz (un la#) dans l’oreille droite + un son “plat” à 124Hz (un si) dans l’oreille gauche -> on entend un “si-la#”, accompagné d’un “wum-wum-wum-wum” à 124Hz-114Hz = 10Hz (c’est-à-dire 10 battements par seconde). C’est là le battement binaural en question. Il est donc possible de créer des battements qui vont vers du beta et du thêta.

Battement du tambour du/de la chamane (Ondes beta et thêta)

Stimulation par la lumière à des rythmes précis,

Dans des lunettes ou avec une lampe sur pied comme la Pandora Star (lampe neuro-stimulatrice combinant quatre oscillateurs stroboscopiques indépendants (une lumière blanche qui clignote) variant à la fois en vitesse et en intensité.

L’interaction de ces sources de lumière déclenche l’expérience (vision) d’un monde de couleurs et de formes, différent à chaque voyage.

Ce neuro-stimulateur déclenche des formes d’ondes cérébrales (EEG) normalement observées après plusieurs années de pratique de méditation.

L’action se fait au niveau de la glande pinéale responsable, entre autre, de la sécrétion de la DMT (diméthyltryptamine).

Technique de la respiration holotropique :

Mouvement continu (danse des 5 rythmes, derviche tourneur.)

Immobilité (tenir une posture en yoga et en méditation.)

Fixation de l’attention sur un objet extérieur (bougie, feu, pendule.)

Fixation de l’attention sur un objet intérieur (respiration, tension musculaire, battement de coeur… mais aussi acceptation de l’émotion de la pensée, de la crampe que j’observe et accueille… pour la méditation de pleine conscience)

Rituel et mantra

Toucher point d’acuponcture et mouvement visuel(méthodes psycho-corporelles, EFT, …)

Contamination : en contact avec une personne en transe hypnotique, il est possible d’entrer rapidement en EMC

  • Hypnose,
  • Méditation de pleine conscience
  • Cohérence cardiaque
  • Yoga,
  • Respiration holotropique,
  •  Ho oponopon
  • Néo chamanisme,
  • Danse des 5 rythme,
  • EFT (Emotional Freedom Technique),
  •  Sophrologie

Permettent ainsi de modifier l’état de conscience sans prendre de substances, pour lancer un processus de transformation de la subjectivité vers un mieux-être

 (Il ne s’agit pas ici de séances récréatives).

Pourquoi certains hypnotiques sont-ils choisis pour les études scientifiques?

Certains des hypnotiques, comme l’hypnose Ericksonienne, la méditation de pleine conscience, la cohérence cardiaque, sont étudiés en laboratoire de recherche.

Ce sont des hypnotiques qui sont en voie de reconnaissance par les institutions (hôpitaux, universités, médicales, système scolaire) et les entreprises… et qui sont en voie plus ou moins avancée d’encadrement légal.

D’autres partagent des habitus avec des techniques de tradition religieuse ou mystique (tambour, rituel, plume, chants, appel aux esprits…) ou avec des techniques qui utilisent des drogues.

Ces résonances leur donne un côté « new âge » ou sulfureux ou hasardeux, incompatible avec les institutions.

Le souci pour l’étude de certains hypnotiques est aussi la diversité des pratiques regroupées sous un même nom. Le néo-chamanisme, par exemple, rassemble autant des praticiens ayant étudiés et intégrés l’enseignement de la sérieuse Foundation for shamanic studies, que des personnes qui ont passé un temps en Amazonie et qui en sont revenus avec l’impression d’être devenu guérisseur/euse super magique.

 Le corpus (profils, outils, processus, croyances…) est donc très hétérogène.

Que mesure-t-on dans ces études?

Les drogues hallucinogènes agissent sur le cerveau et sont étudiées en laboratoire depuis longtemps.

Mais le corps est aussi capable de fabriquer des drogues naturellement (chimie du cerveau: diméthyltryptamine, mélanine, sérotonine, dopamine, adrénaline,…), qui ont un effet sur les états de conscience et qui peuvent être mesurées.

Les fréquences en Hz présentes dans le cerveau et l’activation des différentes zones du cerveau peuvent être étudiées également.

L’on peut aussi mesurer des facteurs physiologiques (le rythme cardiaque, le rythme respiratoire, la pression artérielle, les mouvements oculaires, la dilatation des pupilles…),

Sans compter le vécu subjectif des sujets d’expériences et les rapports des chercheurs praticiens en hypnose.

Il y a donc de multiples facteurs à prendre en compte pour comprendre comment le cerveau gère les états modifiés de conscience.

L’hypnose et la science: 2 mesures

L’hypnose produit un ensemble de modifications neurophysiologiques suffisamment caractéristiques pour être objectivées grâce à l’imagerie médicale.

L’authentification neurophysiologique du phénomène est rassurante, mais elle n’explique pas pour autant les manifestations psychologiques.

Il existe donc d’un côté des recherches sur l’efficacité de l’hypnose et de l’autre côté des recherches sur le fonctionnement de l’hypnose sur le cerveau.

activité cérébrale associée à l’hypnose

Les neurosciences

Des chercheurs parviennent à visualiser les effets de l’hypnose sur le cerveau, grâce à de nouvelles techniques d’imagerie.

Les explications neurologiques sont disponibles dans les nombreux liens ci-dessous.

Je ne reprends ici que quelques conclusions.

Tout le monde n’est pas hypnotisable au même degré

Par exemple, pour sélectionner 43 sujets «hautement hypnotisables», l’équipe du Pr Spiegel a d’abord soumis 545 étudiants à différents tests de suggestibilité.

L’objectif était ensuite de comparer leurs IRM avec celles de 24 étudiants «peu hypnotisables».

 «Dans la population générale, il y a plus de personnes réfractaires à l’hypnose (environ une sur trois) que de personnes très sensibles, environ 15 %».

Un état différent du sommeil, de la pleine activité, de la rêverie, de la méditation…

L’activité du cerveau sous hypnose diffère complètement de celle du sommeil, de la méditation et de la rêverie (réseau par défaut).

L’état d’hypnose est donc un état de conscience  singulier.

Il s’agirait davantage d’un état de plein éveil ou « éveil paradoxal » (pour répondre au « sommeil paradoxal »).

Des ondes Alpha et Theta

Les ondes électriques cérébrales durant la pratique de l’hypnose sont mesurables par électroencéphalographie (EEG), qui mesure l’activité électrique du cerveau et la représente sous la forme d’un tracé.

Les ondes Bêta (13 Hz et davantage) : état de veille, activité, apprentissage.

L’encéphalogramme nous montre que le cerveau affiche des cycles de l’ordre de 14 à 21 cycles par seconde.

Dans les états d’hyper-activité, notre cerveau fonctionne bien plus près des 21 cycles/secondes que celui des 14 cycles.

Les ondes Alpha (8 à 12 Hz) : méditation, hypnose très légère, visualisation.

Dès que nous avons les yeux fermés, que nous prenons une position confortable, allongé sur un lit par exemple, automatiquement l’encéphalogramme affiche un ralentissement des ondes cérébrales et notre cerveau fonctionne alors suivant un rythme qui oscille entre 7 et 14 cycles/secondes.

A ce rythme, les deux hémisphères du cerveau arrivent à fonctionner ensemble en harmonie.

Cela se fait progressivement: au début, l’état est proche de l’état d’éveil, nous sommes juste en position de relâchement, puis tout notre corps se détend, avec la possibilité de penser à des préoccupations, puis vient l’impression de planer, puis le passage vers l’état plus profond.

Les ondes Thêta (5 à 7 Hz) :  état de transe hypnotique profond.

Lorsque l’activité cérébrale se ralentit encore et que nous arrivons dans une zone qui oscille entre 4 et 7 cycles/secondes, nous pouvons dire que le cerveau fonctionne au rythme des ondes Théta.

Ce rythme correspond à la phase du sommeil léger, et plus nous nous enfonçons dans ce rythme, plus le sommeil devient profond.

Au niveau Thêta, nous trouvons aussi la zone correspondant à l’hypnose guidée et la zone d’insensibilité à la douleur.

C’est donc ce niveau que nous explorons lors des séances d’hypnose profonde et de régression, et aussi celui qui est utilisé dans les hôpitaux pour l’hypnose d’anesthésie

Les ondes Delta (0,5 à 4 Hz) : sommeil profond.

Plus nous fonctionnons en dessous de 4 cycles/secondes, plus nous sombrons dans des états de coma qui s’approchent de la mort physique.

Dans cette zone, seules les fonctions vitales sont assurées par le cerveau.

Lorsque l’encéphalogramme affiche un tracé plat, cela signifie la mort cérébrale…

N’ayant plus d’activité cérébrale, l’individu est considéré comme mort physiquement.

Sous hypnose, on vit une expérience, on ne se remémore pas un souvenir

En état d’hypnose, le sujet, apparemment somnolent, expérimente par le biais de l’imagerie mentale un souvenir cohérent, vivace et multi sensoriel

Sous hypnose, il y a activation des réseaux cérébraux suivants:

  • la région occipitale, comme s’il voyait réellement
  • cortex préfrontal et régions associées (sensations multisensorielles)
  • les régions pariétales, comme si le sujet éprouvait les sensations de nager alors qu’il est immobile sur la table
  • les régions précentrales, comme s’il bougeait réellement.
  • Il y a désactivation du précuneus et du cortex cingalaise postérieur qui corrélés au siège de la conscience de soi au point de vue conceptuel et exécutif (sentiment d’être soi, initiateur de ses actes), régions activées en état d’éveil et désactivées en état de sommeil.

Pour un patient qui ne serait pas en état d’hypnose, ce sont les lobes temporaux de droite et de gauche qui s’activent lorsque que celui-ci se remémore simplement un souvenir.

Effet téléobjectif 

« Sous hypnose, on réduit son attention comme sous l’effet d’un téléobjectif. Ce que l’on voit est beaucoup plus détaillé mais on voit moins ce qu’il y a autour. Il y a une réduction de l’activation des régions cérébrales (cortex cingulaire dorsal antérieur) qui évaluent le contexte, nous aident à décider parmi la multitude de choses qui nous entourent lesquelles il faut ignorer et celles qui méritent notre attention. » (Professeur David Spiegel, directeur du «Centre de santé et stress» de l’université de Stanford, en Californie).

Les patients hypnotisés sont davantage en mesure de se concentrer sur une tâche en particulier, sans se soucier de l’environnement extérieur.

(Travaux du Professeur Faymonville, du CHU de Liège, par neuro-imagerie)

Diminution de la sensation de douleur

L’intensité de l’activation du cortex cingulaire antérieure, la zone qui correspond aux aires de la douleur dans le cerveau est diminuée lorsqu’une personne est sous hypnose.

Contrôle des réactions physiques en réponse à des facteurs de stress

Pour le Pr David Spiegel, directeur du «Centre de santé et stress» de l’université de Stanford, en Californie,

Sous hypnose, il y a une augmentation des connexions entre la partie du cerveau impliquée dans le contrôle exécutif (le cortex préfrontal dorsolatéral ou DLPFC) et la partie qui règle les fonctions corporelles (insula).

L’hypnose aide ainsi les gens à contrôler leurs réactions physiques en réponse à des pensées et des facteurs de stress.

Une plus grande connexion entre l’esprit et le corps

Les réseaux associés à la communication entre l’esprit et le corps seraient plus connectés que dans un état non-hypnotique.

Action sur l’exécution du mouvement lors des paralysies hypnotiques

La motricité implique de nombreuses parties cérébrales de notre cerveau.

Lors d’un mouvement nous réalisons trois phases:  

L’intention motrice, la préparation du mouvement, l’exécution du mouvement.

L’hypnose ne modifie pas la préparation du mouvement, étant donné que le cortex moteur et la voie corticospinale s’activent. 

L’hypnose agit cependant sur l’exécution du mouvement, qui est contrée.

PS: notons que les test effectués en hôpitaux, pour les besoins des machines, se font la plupart du temps en position immobile. Or, il est possible de danser, de parler, de dessiner en état d’hypnose!

Les rapports sur l’efficacité de l’hypnose

Comme l’efficacité de l’hypnose dépend du contrat thérapeutique, c’est à dire de l’adaptation du thérapeute à son sujet et de l’implication du sujet et des ses peurs.

Il est difficile de tester en laboratoire – avec des protocoles unifiés et sans enjeux autres que les tests – des états hypnotiques semblables à ceux qu’une personne vit avec son praticien en thérapie ou en traitement de la douleur.

L’INSERM a rendu un rapport détaillé qui en fait état.

  • Rapport de l’Inserml’efficacité de l’hypnose
  • Il existe une vingtaine d’études cliniques (incluant plus de 100 sujets) et/ou revues de la littérature réalisées par la fondation Cochrane qui ont eu pour but d’évaluer l’efficacité de l’hypnose dans certaines de ses indications: hypno-sédation, hypno-analgésie (accouchement, intervention chirurgicale, etc.), pathologies fonctionnelles (colopathie, bouffées de chaleur, etc.), psychiatriques (addictions, stress post traumatique).
  • Certaines de ces études ont de réelles qualités méthodologiques. Les résultats sont variables.
  • Il existe néanmoins suffisamment d’éléments pour pouvoir affirmer que l’hypnose à un intérêt thérapeutique potentiel, en particulier en anesthésie préopératoire ou dans la colopathie fonctionnelle (colon irritable).
  • Des études qualitatives conduisent cependant à relativiser la portée de ces conclusions : les bénéfices de l’hypnose tels que formulés par les patients ont du mal à être traduits en termes numériques à l’aide des instruments cliniques habituellement utilisés dans les études.
  • Par exemple, dans le traitement de la douleur, c’est l’impact émotionnel de la douleur qui serait réduit par l’hypnose plus que l’intensité de la douleur elle-même.

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